Un Couvreur nommé Janus

Représentation artistique de Janus, dieu de la dualité, entouré de symboles ésotériques et d'une aura de mystère.
Dualité de Janus.

Ce texte aborde la transformation symbolique d’un Vénérable Maître en Couvreur à travers le prisme de Janus, soulignant la dualité et le cycle de vie au sein de la Franc-maçonnerie. Le Couvreur, en face du Vénérable Maître et armé d’une épée, symbolise le gardien de la Loge. Il représente la transition entre les mondes profane et sacré, incarnant à la fois le passé et le futur, et mettant l’accent sur l’importance de la concentration intérieure et la sacralisation de l’espace.

Nouveau cycle : du Vénérable Maître au Couvreur

Janvier : une nouvelle année commence. Un nouveau cycle débute, et pour Léonardo c’est aussi le cas !

Notre Vénérable Maître m’a demandé de réfléchir sur le thème du passage de Vénérable Maître à Couvreur au travers du prisme de Janus.

Le couvreur est situé dans l’axe de la Loge, directement en face du Vénérable Maître. Son bijou est l’épée. Il intervient principalement pour vérifier si nous sommes à couvert lors de l’ouverture des Travaux et c’est lui qui donne l’accès à la Loge lorsque les travaux ont débuté. En effet, lors d’une cérémonie d’Initiation, c’est le Couvreur qui va ouvrir et donner l’accès à la porte basse.

Le rôle clé du Couvreur dans la sacralisation de l’espace

Une fois que nous avons pris place, l’une des premières étapes de l’ouverture des travaux est de s’assurer que nous sommes à couvert : c’est le premier devoir d’un surveillant en Loge.

C’est donc un devoir, et c’est au Couvreur de s’en charger.

Pourquoi être à couvert pour procéder à notre tenue ? La première explication qui vient naturellement à l’esprit est qu’il faut s’assurer que les profanes soient tenus à l’écart mais nous pouvons aller plus loin. J’ai trouvé dans un commentaire d’instruction une autre perspective que je vous livre ici : « parce que toutes les forces qui sont destinées à se déployer utilement au dehors, doivent tout d’abord être concentrées sur elles-mêmes et acquérir ainsi leur maximum d’énergie expansive ».

C’est donc pour s’en assurer que le Couvreur, armé de son épée, va ouvrir la porte et inspecter les abords.

Mais alors que se passe-t-il derrière cette porte lorsque le Couvreur vient de sortir ? Il passe à l’action activement, il va procéder à une inspection minutieuse et observer attentivement ce qui se cache derrière la porte. Cette action n’est en rien banale ou machinale, elle est au contraire difficile et exigeante. En regardant à l’extérieur, en chassant le profane, c’est en fait, à l’intérieur de lui qu’il regarde. Et durant ce laps de temps où il est en train d’accomplir ce devoir physiquement, chacun est invité à en faire de même en explorant son propre intérieur.

Et c’est précisément parce qu’il est Ancien Vénérable Maître qu’il est en mesure d’accomplir cette tâche. Il va s’armer de son épée qui est constituée d’une part de Lumière rapportée de l’Orient où il était précédemment. Seul un œil avisé peut avoir le recul nécessaire pour remplir correctement ce devoir. Nous y reviendrons par la suite…

Alors qui de mieux pour représenter le Couvreur si ce n’est Janus le divin gardien des portails ! Avec ses attributs singuliers, il reflète de manière éloquente et l’on ne peut plus frappante, les aspects essentiels de la mission du Couvreur.

Janus et la dualité : harmonie des opposés

Janus, avec ses deux visages regardant dans une direction opposée, est le plus à même de nous expliquer la notion de dualité !

Il incarne non pas un conflit mais une complémentaire harmonie, en se focalisant sur non pas sur l’opposition de 2 idées « contradictoires » mais plutôt le contraste extrême d’un seul et même vecteur. On peut aussi parler d’éléments polarisés : deux aspects différents d’une même réalité. On peut donner comme exemple l’ombre et la lumière ou encore la vie et la mort. Au lieu de les voir comme des opposés en conflit, on peut trouver la complémentarité dans l’idée où la vie trouvera son sens et sa valeur grâce à la compréhension de la mort et inversement, la mort gagnera toute sa valeur selon la vie que l’on aura vécue. Nous avons un contraste maximal d’une seule et même proposition : l’existence. Cela aboutit à un enrichissement de notre compréhension première.

Ainsi, en revenant à Janus, ses deux visages, loin de s’opposer, illustrent le contraste dynamique entre deux états. Le Couvreur en sa qualité d’ancien Vénérable Maître et de gardien des portes, unifie en sa personne ces deux dimensions. Elles ne sont pas contradictoires mais sont les deux faces d’une même médaille et représentent une progression naturelle.

Janus et le Couvreur : gardiens du seuil sacré

Janus est le gardien des portes, tout comme le Couvreur est le gardien de l’interface entre les mondes profane et sacré au sein de la Loge. Le rôle de gardien de Janus s’étend au-delà de la simple surveillance. Il protège le passage entre les mondes, maintient la sécurité et la sacralité de l’espace. De même, le Couvreur assure cette même fonction mais pour autant, il ne faut pas penser que c’est de sa seule responsabilité. Il n’est qu’un exemple que chacun doit imiter. En effet, il appartient à chacun de sacraliser l’espace afin de basculer pleinement dans le Sacré.

Janus intervient également pour sacraliser le temps : précisément, un aspect fascinant de Janus est sa temporalité. Il a un visage tourné vers le passé et un autre vers le futur, de fait, il habite le présent. Cette représentation temporelle est profondément liée à la transition. De même, le Couvreur gère les transitions au sein de la loge maçonnique, assurant le passage en douceur d’un état à un autre. Sa présence rappelle que le présent est le point crucial de la transition. Nous sommes dans le « Ici et Maintenant ».

Le seuil et l’initiation : le rôle du Couvreur

Avec ses deux visages adossés, Janus le Couvreur surveille les entrées et les sorties.

En tant que gardien du seuil, épée en main, il veille sur le mince et fragile passage entre ces deux mondes, toujours prêt à défendre le trésor de notre Loge.

Pour franchir la porte, il faut simplement frapper (et l’on vous ouvrira). En général, la porte s’ouvre en grand sauf lors des cérémonies d’Initiation, là, c’est la porte basse qui rentre en action.

Pour franchir le seuil gardé par le Couvreur, il est nécessaire de reconnaître l’importance de l’humilité mais aussi une forme de respect. Le Couvreur, en tant que gardien vigilant, veille à ce que seuls ceux qui en font preuve puissent passer, tout comme Heimdall, gardien du pont Bifröst, protégeait l’accès au monde divin avec une vigilance similaire.

De l’Apprenti au Couvreur : le cycle de la Tradition

Ainsi l’ancien Vénérable Maître devient Couvreur.

Nous avons vu que cela représentait un nouveau cycle nécessaire. Le travail du Couvreur n’étant pas facile, il bénéficie de toute son expérience passée pour assurer son rôle de manière parfaite : allant même jusqu’à emporter avec lui un petit bout de la Lumière de l’Orient pour assurer son office !

Pourtant, le rôle de couvreur n’a pas toujours été confié au Vénérable Maître passé. Dans de vieux rituels maçonniques, le poste de couvreur était confié au dernier reçu apprenti.

Là encore, il ne s’agit pas de notions en opposition. On retrouve la notion de dualité portée par Janus : L’apprenti deviendra lui-même Vénérable Maître afin de Transmettre la Tradition. Ici, il s’agit simplement d’un contraste maximal de la même notion : le cycle.

En effet, que le Couvreur soit le dernier apprenti reçu ou le VM passé, dans tous les cas, cela marque le début d’un nouveau cycle en mettant en avant la notion de renouvellement constant au sein de la loge.

La boucle se referme, et un nouveau cycle commence. Mais comme nous le montre le symbole de la spirale, après une révolution complète, le cercle ne se ferme pas complètement, son rayon a progressé et c’est un nouveau cercle un peu plus grand qui continue le travail. Il n’y a pas d’immobilisme possible ni de retour à la situation antérieure.

Cela rappelle à tous les membres de la loge qu’ils ont la possibilité de prendre part à ce nouveau cycle, apportant avec eux leur propre expérience et leur contribution à la croissance continue de la loge. Le Couvreur, en tant que gardien vigilant du seuil incarne la notion de cycle : cette transition et cette évolution au sein de la communauté.

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