Le Tableau de Loge

Après l’ouverture des Travaux rituels, l’Orateur donne lecture de la Règle Unique du GOTM : « Maçons Libres, nous choisissons de le rester, et de vivre et de travailler dans une Respectable Loge Libre et Souveraine ».

Puis, vient le mot introductif du Vénérable

Mes Sœurs et Frères,

Dans le domaine de la restauration des fresques murales, que je connais un peu, deux solutions et deux écoles s’affrontent à chaque fois. La première école préconise de laisser apparente l’usure du temps, les traces du passé, les accidents de l’histoire, en les figeant dans le moment présent, mais en toute connaissance de cause. La deuxième s’emploie, au contraire, à réinterpréter l’œuvre face à la disparition du trait, des formes et des couleurs, dans le but de la faire perdurer, mais surtout dans celui de la rendre vivante afin que chacun puisse se l’approprier en y découvrant une logique du langage, une puissance du sens caché. Pour la première école, c’est l’objet, son auteur, son époque, qui suscitent toute l’attention. Pour la deuxième, c’est la beauté de l’œuvre, l’émotion qu’elle procure, l’idée qu’elle soutient, qui en sont principalement restitués…

Ces deux états d’esprit sont louables, tout à fait légitimes.

Toutefois, quel regard voulons-nous porter sur le passé ?

Quel regard voulons-nous porter sur l’Histoire, la grande ?

Et quel regard voulons-nous porter sur la transmission ?

Sommes-nous les gardiens d’une Connaissance figée dans le temps et à chaque fois réinventée ? Ou bien devons-nous transmettre cette Connaissance qui ne peut être qu’une histoire à venir et en devenir, pour vous, pour moi, pour nous tous ?

Alors, face à la nécessité de restaurer toute la symbolique de son Tableau de loge, les Sœurs et les Frères de Leonardo ont privilégié la deuxième solution en prenant soin, après diverses réflexions, de ne point travestir la Tradition. Au contraire, nous nous sommes évertués à rechercher, à comprendre les intentions de nos prédécesseurs, et à les rectifier quand cela nous semblait nécessaire. Ainsi, les représentations symboliques de notre Tableau comme leurs emplacements ont parfois évolués, mais en suivant scrupuleusement le sens que nous donnons collectivement à notre démarche initiatique.

Aujourd’hui, à l’occasion de cette tenue commune entre nos loges sœurs, nous voulons partager avec vous ce parfum de renouveau, nécessaire à l’espérance, à l’ardeur et à la joie que nous portons dans nos cœurs.

Notre Sœur Odile, passé Maître de la loge Leonardo va maintenant devant vous dévoiler le chemin de notre démarche, le plan secret de notre communauté initiatique. Pendant ce temps, ô combien sacré, notre Frère Orateur va commenter ce tracé périlleux en vous apportant la synthèse de nos travaux. Et puis, nos trois Sœurs et Frères présents à l’Orient procéderont à la consécration de notre nouveau Tableau de Loge. Gérard , également Passé Maître de notre Loge Leonardo, présidera cette cérémonie ésotérique, et sera accompagné de deux autres Consécrateurs et Passés Maîtres : Carole et Bruno .

Beaucoup d’entre nous ont déjà assisté à une Cérémonie de Consécration qui, la plupart du temps, inaugure la création d’une loge et l’installation de son Vénérable Maître. Bien entendu, il ne s’agit pas de cela ! Ce soir nous allons ni consacrer la loge, ni ses Officiers, encore moins le local où nous nous trouvons. Ce soir, nous allons animer chaque élément de notre démarche, nous allons porter la vie sur ce tableau comme nous la portons en nous et faire en sorte qu’il devienne le point central de notre communauté et de notre fraternité. Ce soir, nous allons faire en sorte que ce tapis, ce tapês, ce tempus, ce templum – qui, quelque soit la langue que l’on use, se rattache toujours à cet espace et ce temps que nous contemplons ensemble – ce soir disè-je, nous allons faire en sorte que ce tapis devienne mouvant, comme une spirale que l’on anime deviendrait vortex…

Ce soir, nous allons rendre les honneurs à notre engagement de Maçon car c’est tout le sens que nous portons à la Consécration. Oui, pour nous tous, « consacrer » ne veux pas dire « commémorer ». Consacrer est un acte qui dépouille du superflu pour ne révéler que l’essentiel, la vraie nature des choses, notre vraie nature de cherchant Franc-Maçon.

L’artiste se prépare à peindre en direct le Tableau de Loge…

Reprise de la Parole du Vénérable.

Vous découvrez devant vous ce tableau encore vierge, dont les dimensions respectent le rapport de 1 sur 2. Autrement dit, voici un « carré long » permettant une multitude de tracés géométriques savants, éclairant le Maçon tout au long de sa démarche en lui donnant les clefs de ses révélations successives.

Bien entendu, ces dimensions rappellent aussi celles du Hekhal, le Saint du Temple de Salomon décrit dans le livre des Rois de notre Volume de la Loi Sacré. Le Debir, ou le Saint des Saints, et le Parvis avec ses Marches seront également représentés mais en superposition, par une opération de pliage, sur la partie supérieure et inférieure du tableau.

Ainsi, malgré son évidente représentation en deux dimensions, est sous-entendue une troisième dimension dont l’espace s’articule fondamentalement en une division Ciel et Terre et par laquelle le Maçon se projettera sans cesse.

Maintenant, entrons dans le tableau…

Parole de l’Orateur, l’Artiste peint…

Les marches :

3 marches… 3 marches pour commencer.

Avant de les emprunter, nous sommes sur le « sol » qui correspond au monde profane aveugle dans le sens où nous nous trouvons sur des rails culturels, religieux, professionnels, familiaux, en la forme de la droite ligne de notre éducation, de ce qui nous a fait.

Et puis, vient une épreuve, un constat qui nous met en rupture avec ces rails parce que la perspective ne nous convient plus.

Alors, vient le temps du questionnement lié au sentiment d’isolement, d’absence de repères, en tout cas d’insatisfaction, de déséquilibre car on ne trouve pas ce que l’on cherche. Les questions surgissent mettant en évidence une intuition qu’il existe autre chose ailleurs.

A la suite à cette prise de conscience, cette rupture d’avec le monde qui nous entoure et surtout avec nous-mêmes, une perspective devient nôtre : une promesse qui nous est offerte parce que nous allons rencontrer des personnes comme nous. Plus d’isolement ! Nous avons enfin la possibilité de trouver les réponses, les solutions tant recherchées… C’est cette perspective qui nous pousse à nous :

élever (première marche, premier concept). Nous nous élevons car nous avons pris conscience que notre vie n’est pas en adéquation avec nous-mêmes. Il y a donc séparation d’avec le profane. C’est l’objet du Aleph. Cette élévation est possible car nous avons :

l’espérance (deuxième marche, deuxième concept) qui nous donne la volonté et l’énergie de le faire. Cette force volitive qui réunit les conditions de création en notre sein est l’objet du Beith pour nous amener vers un :

ailleurs (troisième marche, troisième concept), concrétisant ainsi le premier d’acte d’homme libre dans le monde profane, objet du Ghimel car en changeant de plan nous nous constituons homme libre prêt à recevoir l’initiation.

Ainsi, en empruntant ces marches, nous avons la volonté de nous élever motivés par l‘espérance d’un ailleurs inconnu de nous.

Le Parvis :

Le Parvis est l’espace situé immédiatement devant l’entrée du temple.

Et même s’il est situé à l’extérieur du temple, le Parvis représenté par le Pavé mosaïque est un symbole omniprésent dans tous les rites. L’opposition des carrés noirs et blancs est une évocation évidente de la dualité. Le pavé rappelle les oppositions, les contradictions et les paradoxes dont nous sommes tous constitués que l’on soit profane ou initié.

Ce n’est donc pas un hasard si ce symbole binaire est placé sur les parvis du temple.

Le monde profane se complet dans cette vision dualiste du monde, tout est pour lui forcément tout noir ou tout blanc. Cela engendre inévitablement des réactions passionnelles comme l’intolérance, l’intransigeance, le dogmatisme qui n’aboutissent qu’à la haine de celui qui ne pense pas comme nous.

La proposition qui est faite à celui ou à celle qui foule le pavé est de se mettre en résonance avec sa propre bipolarité pour passer sur un autre plan : le ternaire.

Passer du binaire au ternaire c’est donc en quelque sorte rassembler les forces opposées en soi pour faire naître une troisième force dont l’énergie nous met désormais en capacité de passer outre notre propre condition humaine, nous permet d’avancer sur le chemin de la connaissance de soi et de l’univers.

Les Colonnes :

Lors de l’Initiation, le récipiendaire est placé entre les colonnes dès son arrivée. Il y retourne après chaque voyage et c’est à cet endroit qu’il reçoit la lumière au 3e coup de maillet, qu’il rentre dans la chaîne d’Union et qu’il reçoit l’instruction du grade.

Elles assurent la transmission de la Tradition. Ces colonnes ont un nom : Boaz et Jakin.

Nommer c’est attribuer une reconnaissance nominative, nommer c’est donner vie, c’est s’identifier à l’objet de la connaissance. Les colonnes sont l’arbre de vie qui trouve ses racines dans la terre et dont le feuillage s’élève jusqu’aux cieux.

L’Initié est en position centrale entre les colonnes. Une union entre la terre et les cieux, et au centre, comme réceptacle, l’humain. Harmonie où l’humain devient un lien entre ce qui est en bas et ce qui est en haut. L’unité du trois.

Il canalise le passage de la lumière. Il est au centre de la Création.

La Porte :

Nous sommes à présent face à une porte. La porte est un symbole qui révèle le caractère de l’initiation. Nous sommes amenés à franchir une succession de seuils dont la finalité est une progression de notre connaissance. Lors de l’initiation, on entre par la porte basse. Pour la franchir, il est nécessaire de faire preuve d’humilité en se courbant, en se faisant petit.

La porte est un mystère. Qu’y aura-t-il derrière ? Au vu de l’architecture, nous y trouverons probablement un temple, un sanctuaire, certainement nous-même et ce que nous y amènerons.

La porte sépare deux environnements. Elle sous-entend un dehors et un dedans, une frontière qui inclut, exclut, le profane, le sacré, le matériel, le spirituel, la mort, la renaissance…

Face à cette porte, il n’y a qu’un seul passage possible. Dans quel sens sommes nous ? Cette porte permet-elle d’entrer et de sortir, permet-elle d’entrer ou de sortir ? Est-elle à l’image du Janus bicéphale, le dieu romain du passage et des portes, avec un visage dans un sens et un autre visage dans l’autre sens. Pourra-t-on faire des aller-retours, est-ce un aller sans retour comme un accouchement ou un retour dans la matrice, sur soi, en soi, vers une réunification. Il est probable qu’une fois franchi le seuil, nous ne soyons plus le même et que le retour devienne impossible.

Que faut-il pour franchir cette porte, certainement une volonté qui pose la question de notre motivation. Nous sommes seuls devant cette porte, personne n’appelle depuis l’intérieur, personne ne nous pousse depuis l’extérieur. C’est toujours la même histoire, il faut se mettre en position de déséquilibre.

Le mouvement c’est la vie, alors mettons un pied devant l’autre et faisons l’expérience de la Vie. Cette porte est une promesse de futur et de tous les possibles.

Cordon, houppe, lacs

La Houppe dentelée est faite de liens tressés qui représentent les Sœurs et les Frères de cette respectable loge, unis à jamais dans la recherche de la Vérité. Elle est semblable à un faisceau où les âmes profanes s’unissent, s’ordonnent, se nouent à ses semblables initiées qui forment cette chaîne d’union : acte de transmission en ce partage, le plus intime, pour ne former plus qu’Un.

Elle entoure et protège le Temple : courant de la tête de colonne jusqu’au Vénérable Maître, s’élevant hors de notre plan, dans la voûte étoilée jusqu’aux astres. Puis, enrichis d’une infime perception du Cosmos, revenir jusqu’à l’autre colonne jusqu’à son pied plongeant dans le plan, celui du pavé mosaïque de Notre Miroir, au plus profond de nous.

Équerre et compas

La prestation de chaque serment au Rite Ecossais Ancien Accepté s’effectue sur l’équerre et le compas parce que nous prenons conscience de nos responsabilités fonctionnelles. La responsabilité est l’agent de la Conscience la plus haute. L’homme peut accepter ou refuser d’entrer en rapport avec sa conscience supérieure : c’est le moment de son engagement à entrer dans l’Ordre ou de continuer la Voie Initiatique.

Le compas apportera la prudence, la tempérance, la véracité, toutes les vertus fondées sur l’esprit de mesure. Le compas indiquera l’emprise sur la matière, non pas pour l’éliminer ou la refuser car elle fait partie intégrante de notre monde, de notre vie, mais simplement comme une invite à dépasser le stade de l’animalité pour aspirer, pour atteindre la vie spirituelle qui caractérise, seule, l’Homme. De plus, le compas lui offrira toutes les possibilités des connaissances et, en même temps, toutes ses limites.

L’équerre aidera à vérifier si une pierre taillée est bien juste et pourra être insérée parmi les autres pierres. Ainsi, le cherchant saura le niveau de perfection de sa pierre et s’il a la volonté de lui faire prendre sa juste place, car il est le seul capable de choisir sa relation avec les autres, sa voie et son chemin. Il n’oubliera plus, grâce à l’équerre de réunir le vertical et l’horizontal, et concilier ainsi les contraires, ce qui induit l’équilibre, la tolérance, l’équité.

Le compas et l’équerre, ensemble, définitivement et solidement accouplés, sont les emblèmes de la science maçonnique que doit posséder celui qui les intègre.

Rien ne pourra plus lui enlever sa capacité de passer du physique au spirituel.

Ainsi, l’équerre et le compas sur le Tableau de Loge s’inscrivent au centre de celui-ci laissant à tout moment au cherchant la possibilité de cheminer dans ce Tableau, librement… entre l’Équerre et le Compas.

De la Pierre brute à la Pierre cubique

D’un point de vue opératif, on peut définir la pierre brute comme une masse extraite de la matière minérale, afin qu’une fois taillée, elle puisse être utilisée dans la construction d’un édifice. Elle devra d’abord être dégrossie pour prendre enfin la forme d’une pierre cubique et pouvoir prendre place au sein de la construction. Lui conférant par sa densité la solidité désirée et par son esthétique parfaite l’harmonie recherchée.

L’analogie du processus avec le parcours du maçon n’est pas fortuite.

Lorsque le profane frappe à la porte du temple pour y être accueilli, il fait encore parti de la masse des hommes. Il ne devient pierre brute qu’au terme de sa cérémonie d’initiation. Il entre donc en maçonnerie à l’état de pierre brute encore marqué des aspérités des turbulences de la vie profane. Il devient alors l’artisan de sa propre transformation. Son premier travail d’apprenti consistera à dégrossir dans le silence et sans relâche cette pierre brute et pour ce faire lui seront confiés deux outils et un principe.

Pour la dégrossir, le ciseau va apporter sa précision et sa maniabilité, le maillet apportera la force et le courage. C’est donc par un processus d’ablation de matière que l’apprenti va opérer. Comme s’il devait chercher à se débarrasser du superflu qui meuble le quotidien de sa vie de profane pour se rapprocher de l’essentiel.

Le travail est initié, l’objectif est défini, la pierre brute doit travailler à devenir une pierre cubique.

Toujours d’un point de vue opératif, on peut définir la pierre cubique comme un pavé formé de surfaces planes coupées à angles droits par des arêtes vives.

Il est évident qu’une pierre bien taillée et respectant ces règles est plus facile à insérer dans un édifice. Cependant, nous ne sommes pas entrés en maçonnerie pour nous plier à une norme mais pour évoluer sur un chemin tracé à notre mesure. Le symbole de la pierre cubique loin de définir l’humain dans un schéma offre à l’individu, par la connaissance de soi et la maîtrise de ses impulsions, l’opportunité de trouver la place qui lui conviendra d’occuper.

La planche à tracer du Maître

La planche à tracer est un outil ésotérique, l’outil fondamental du Maître.

La planche à Tracer en bois est le support rigide et stable que les architectes utilisent pour élaborer leurs plans. Il est composé d’un carré long, d’un tableau avec trois colonnes et trois lignes et d’une croix. C’est un outil qui permet de coder des Lettres et des Nombres.

Avec les Lettres, nous créons les mots qui nous permettent de communiquer, de partager, à condition d’avoir les mêmes mots, ce qui nous ramène invariablement au rituel et aux symboles.

Les Nombres nous permettent de qualifier. Quand nous traçons toutes les Lettres et tous les Nombres, nous faisons un plan.

Les Lettres sont la représentation de ce que l’on est capable d’apprendre, d’enregistrer et de transmettre.

En revanche, les Nombres sont la représentation de ce que l’on à apprendre, puis plus tard à transmettre, les Lettres sont notre capacité et les Nombres notre potentialité au-delà de notre culture propre, ce sont les Nombres qui décrivent la Nature et non pas notre culture. Les Nombres sont des forces, des puissances, des énergies, des entités, des égrégores. Ces forces nous ne les avons pas inventé, elles existent sans nous, elles sont présentes partout.

Les Astres :

Le Soleil et la Lune assistent le Vénérable dans la transmission de la lumière.

Dans l’instruction du grade, un passage nous éclaire : « Quel rapport symbolique existe-t-il entre le Soleil, la Lune et le Maître de la loge ? Le Soleil représente l’intelligence, la Lune figure l’imagination et le Maître de la loge symbolise le principe qui illumine la conscience. »

Nous savons tous que le Soleil et la Lune ont toujours été primordiaux pour l’organisation de la vie sur terre. Les rythmes lunaires et solaires influent sur les plantations, sur les marées, la présence d’eau, des végétaux, sur le climat. Ces flux énergétiques sont continuellement émis dans la nature. Ainsi, la terre reste en équilibre.

Le Soleil nous apporte la lumière directement alors que la Lune reçoit cette même énergie, cette force, cette lumière, qui, à son tour, réfléchit la lumière. La lune reçoit, transmute, filtre cette lumière.

En langue hébraïque, « lumière » est traduit par AOR, sa racine AR est une racine élémentaire qui est composée de puissance et de mouvement, elle exprime tout ce qui est fort, vigoureux, producteur. » C’est aussi : « Tout ce qui coule, tout ce qui est fluide. » La lumière est donc l’action d’éclairer, d’instruire la vie.

C’est ce qui est à l’origine de toute chose. Elle est à l’origine de notre développement parce que tous les possibles sont présents à notre disposition comme une boîte à outils. A nous à l’utiliser dans le bon sens, pour le bien, l’utile, l’essentiel. Nous avons tous cette Lumière, cette énergie qui coule.

La Voûte Étoilée, elle, est présente et nous invite à méditer sur le plan cosmique. Le ciel devient symbole de volonté, de perfectionnement, de libération de soi.

Le Fil à plomb qui part de la Voûte Étoilée est là pour l’introspection et pour la transmission de l’énergie cosmique. Ainsi, l’énergie céleste vient au plus profond de nous et nous pousse à nous dépasser et à nous élever vers une spiritualité plus profonde.

Les astres sont présents pour nous rappeler qu’il faut s’intégrer au cosmos, à la nature. Il nous faut faire ce mariage entre lumière et obscurité, trouver cet équilibre pour devenir le point de concentration énergétique.

A nous de faire le mariage entre intelligence et imagination et devenir le principe qui illumine les consciences.

Les Fenêtres

Au terme de l’Initiation, l’apprenti prend place au Septentrion. Cela lui permet d’embrasser du regard les 3 fenêtres judicieusement placées.

Orient, Midi et Occident sont des points remarquables de la course de la lumière. Lors de l’ouverture des travaux, un cycle se déroule sous nos yeux de midi à minuit. Mais concerne-t-il uniquement la course solaire ?

Nous le voyons bien, la Loge est semblable à un « tunnel » ouvert sur la voûte étoilée et dont l’enceinte nous protège des profanes tenus en respect par l’épée du couvreur, s‘il le doit.

Travaillant de midi à minuit, l’on peut déduire qu’il ne s’agit pas de la lumière physique. Non, cette lumière-là est celle de la lucidité dévoilée par le travail ésotérique en loge.

Revenons à ces 3 fenêtres : on les rencontre parfois grillagées ou pas, mais si tel est le cas, elles feraient office de filtre, de tamis ou sélection de ce qui est sensé passer de part et d’autre et dans les 2 sens.

La « perméabilité » est bilatérale et nous rappelle qu’il ne faut pas se couper ou perdre de vue le monde dans lequel nous sommes.

Car la vie autarcique ne peut conduire qu’au sectarisme profanateur.

Ce contact avec l’extérieur, permet aux 3 fenêtres d’agir comme notre réseau pulmonaire : faire entrer de l’air frais et en expulser la partie viciée des éléments issus de notre épuration biologique.

Aussi, les 3 fenêtres, semblables au fléau d’une balance, permettent la transmission de l’énergie non pas mécanique, mais celle du vivant à la manière d’un ombilic qui nourrit réciproquement.

Le Tableau est peint, le silence s’installe…

Tableau de Loge vu depuis l’Orient

Avant la Consécration, parole est donnée à l’Alchimiste pour présenter les éléments consacrants (huile, vin, sel, blé).

Depuis quelques années maintenant, je n’amorce pas le moindre propos dans un contexte maçonnique sans commencer par un élément de la charte du GOTM qui dit que la démarche du Franc-maçon est initiatique, ésotérique, que la méthode est la symbolique parce que la symbolique est la recherche constante du sens.

J’entends ce point de la Charte comme une maxime et je la clame sans cesse et je la clamerais tant que je n’aurais pas la certitude qu’il n’est plus nécessaire de le faire, quand j’aurais la certitude qu’il n’y aura plus de tabliers papillonnants et futiles qui ornent nos colonnes en faisant peu de différences entre une tenue maçonnique et un spectacle charmant au gala de l’union des artistes, même si je n’ai pas de griefs particuliers à l’encontre des ventriloques ou des pétomanes, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit.

Le maçon véritable, l’initié qui a reçu la lumière et qui a pleine conscience de ses devoirs et de ses pouvoirs a, à l’inverse d’un profane malintentionné et sans imagination, cette capacité de rendre vif ce qui est naturellement immobile, terne et froid.

Donc, nous avons le choix, ici et maintenant, entre deux réalités, celle du paraître, de l’illusion et de l’ennui ou bien celle justement de la recherche constante du sens, celle qui conduit au profit et à la joie.

Alors le caillou, le galet qui n’amasse pas mousse, ne verra dans cette petite réunion de ce soir qu’un petit décorum en crépon où trois « imbéciles » jetterons de la vinaigrette sur un plateau de bois de chez « Bricoloutout », facturé cinq euros TTC et peinturé avec plus ou moins de talent. Rien de nos existences n’aura été perturbé, excepté celle de la femme de ménage qui aura toutes les raisons de nous maudire, elle, qui n’en peut déjà plus de gratter toutes les coulures de bougie sur le carrelage.

Ou bien, la pierre véritable, celle qui a reçu la lumière, celle que l’on taille, verra dans cette cérémonie entre initiés un acte fondateur, une manifestation du sacré, une genèse, une naissance sur les parvis du temple. Je cite l’orateur : « Ayant fini leur œuvre altière, un temple pour l’amour divin, Moïse et Aaron firent sur le seuil, la pierre, couler le blé, l’huile et vin. »

Et c’est de cela qu’il s’agit, mes Frères et Sœurs. Cette convocation que nous avons reçue est un faire-part pour une belle naissance. Tout à l’heure, le vivant va s’inviter dans ce cénacle maudit, noir et endeuillé par une consécration, des offrandes et par la manifestation d’artistes véritables, des sages hommes et des sages-femmes.

Cet événement, car c’est un événement, consiste donc à la consécration du Tableau de Loge des Frères et Sœurs de la Respectable Loge Léonardo à l’Orient de Marseille ; la consécration du nouveau Tableau de Loge, celui qui est sorti de leurs ventres avec sagesse, beauté et « forceps ». Les ressentis et les compréhensions proposés par cette rituélie seront multiples. Par cette cérémonie, tous les leviers de compréhension et de ressenti seront activés, sur des plans hermétiques, mystiques, gnostiques, magiques et naturellement alchimiques.

Il y a un intérêt alchimique particulier dans le cadre d’une consécration d’un Tableau de Loge car la voie symbolique se met en retrait et propose une voie opérative, physique, intime et véritable, là, ou souvent, dans les rituels maçonniques, il est seulement permis une alchimie philosophique, suggestive et collective.

Notre Vénérable Sœur Odile a donné la forme, les contours de l’objet en le forgeant, en le façonnant en le traçant, en le soufflant. Elle a apporté le récipient, le vase, le ballon de verre. D’ailleurs, on aurait pu visualiser notre Vénérable Sœur dans le pavé mosaïque, les deux genoux en terre, plantée, comme en prière, voûtée, arc-boutée devant le travail, avec le mot travail entendu dans son sens obstétrique.

Tout à l’heure, quand Monsieur Loyal « en aura fini avec ces anecdotes », les dignitaires consécrateurs pourront œuvrer par un premier mouvement, une animation en spirale, en déambulant et ils vont nourrir le Tableau de Loge, comme on nourrit la première pierre, afin qu’il s’anime, qu’il devienne fécond et qu’il multiplie.

Alors, il n’est, bien entendu, pas question d’expliquer la valeur symbolique des éléments de l’offrande. Il n’est pas question car il n’est pas possible d’exposer un résumé à propos de la corne d’abondance et du blé, de l’amphore et du vin, du flacon et de l’huile et de la cassolette et du sel. Mais les surveillants, et en particulier, les Premiers Surveillants ont à disposition une multitude de thème à étudier avec les Compagnons. Je précise, tout de même car la période m’y pousse, que le blé et le vin pour une Consécration ne doivent pas se confondre avec le blé et le vin ou le raisin utilisé lors de fêtes solsticiales et autres feux de la Saint-Jean.

Bref, je laisse la symbolique de ces éléments disparates à vos discernements et à vos choix, mes Frères et mes Sœurs et je vais simplement spécifier la nature originale et opportune de ces offrandes.

Les dignitaires consécrateurs utiliseront une corne d’abondance, une corne de bélier car le bélier symbolise, entre autres choses, la première des douze opérations de la voie universelle, la calcination. La corne contient du blé à germer. Le blé à germer jusqu’au pain réunit les quatre éléments, la terre, l’eau, l’air par la fermentation et le feu par la cuisson du pain.

L’amphore de vin ne contiendra ni un millésime grandiose, ni un pinard bouchonné. Elle contiendra ce qu’il convient d’appeler du vin d’or ou de l’esprit de vin. Le vin a été distillé par trois fois, c’est-à-dire rectifié, jusqu’à 90° par la méthode traditionnelle, par l’alambic en cuivre, bien luté à la farine de seigle. En spagyrie, la voie végétale de l’alchimie, on distillera pour extraire le mercure de la plante. L’esprit de vin est un volatil de forme aqueuse qui permet la liaison des principes avec le sel et le soufre. L’esprit de vin sera utile pour la teinture de la pierre.

Le flacon d’huile contiendra de l’huile végétale, de l’huile d’olive, vierge. Mais à l’instar du vin qui n’est pas une boisson, cette huile n’est pas comestible. Aaron, dans la bible, psaume 133, la tire de sa barbe. C’est une huile odoriférante qui servait à allumer les lampes et à parfumer le temple. Elle contient des essences de Myrrhe, d’Oliban et d’encens, un parfum de suave odeur, bien connu des Frères et Sœurs dévolus à Memphis-Misraïm. C’est une huile d’onction, un Saint-chrême qui a été béni tantôt par un Frère prieur du couvent des Carmes à Montpellier, le Frère Jean-Philippe. L’huile représente le soufre, le rayon créateur qui ensemence.

Et comme sur chaque offrande doit être versé du sel afin de sceller justement, alors un des dignitaires consécrateurs répandra du sel sur le Tableau de Loge. Et là encore, à l’instar du vin et de l’huile, ce sel ne sera ni fin, ni gros et sera à manipuler avec prudence. C’est un sel philosophique ou sel alchimique, de la potasse caustique appelé KoH. Il est extrait de cendres longuement calcinées afin qu’elles se présentent bien blanches, sèches et friables et de chaux vive. Pour les voies métalliques, cinabre ou arsenic par exemple, on utilisera un sel chargé d’humidité de l’air ou de rosée du matin à des dates spécifiques. En se liquéfiant, il deviendra résout. On dira qu’il s’est chargé en ciel. A ce propos, l’orateur nous dira : « Jeter le sel en ta présence, Éternel, dans la loge qui renaît, c’est affirmer que ta puissance soutiendra ce temple à jamais. »

Vénérable Maître, mes Frères et mes Sœurs, voici donc l’objet de l’offrande : non pas du blé, du vin, de l’huile et du sel pour une improbable recette de cuisine, avec Hermès Trismégiste en top chef, mais 1 germe, 4 éléments et 3 principes constitutifs de l’Être. Le Tableau de Loge, à l’instar de la pierre sera bien nourri et donc bien fécond.

Et que demander de plus pour l’avenir rayonnant de la Respectable Loge Léonardo à l’Orient de Marseille ? Croître et multiplier.

Suit la Consécration Ésotérique…

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