Nomade

Voyage sur le chemin symbolique de l'initiation maçonnique
Chemin vers la sagesse

Ce texte explore la notion de nomadisme comme un pilier central dans la quête de liberté et de connaissance, en soulignant son importance à travers l’histoire et dans diverses traditions, notamment la franc-maçonnerie. Il met en lumière les voyages initiatiques et leur rôle dans la découverte de soi et la compréhension du monde, en évoquant des exemples historiques et mythiques qui illustrent cette quête incessante de l’humanité pour la liberté et la sagesse.

« Tu ne peux plonger deux fois dans le même fleuve, car il passe » (Démocrite).

Quête de liberté et pèlerinages spirituels

Au bout du chemin, il y a la Liberté et la Connaissance parce que, pour un Nomade, pour un initié la Liberté est plus que jamais son moteur !

« On dirait que l’humanité cherche à se rappeler, on ne sait quelle Loi perdue » (Villiers de l’Isle d’Adam). Notre civilisation aurait-elle perdue le sens du nomadisme ? Quelles étaient les raisons de ces voyages multiples et variés qui ont animé la vie de l’homme depuis la préhistoire…

Le mythe de la parole perdue, la quête du Graal, le pèlerinage sur les chemins de Compostelle, le voyage des compagnons du Tour de France, la traversée du désert ou du miroir, l’initiation maçonnique, la voyance, le labyrinthe, la marche à l’étoile, l’errance du peuple juif… sont des processus infinis tendant à la réintégration dans la plénitude, ils sont autant d’ascensions du néophyte à travers les étapes successives du chemin de sa libération. L’île Sacrée, la montagne Sacrée, le désert, les monts, la montagne Rituelle, le monde souterrain, les enfers… sont autant de lieux qu’il faut soit escalader pour dominer le monde et donc soi-même, soit descendre pour aller au tréfonds de son propre être.

Les Hommes se sont toujours déplacés. Ils ont voyagé du Sud au Nord, de l’Orient à l’Occident et de l’Occident à l’Orient. Depuis peu, les gens du Nord viennent dans le Sud pour trouver le soleil et la douceur de vivre. Mais le voyage touristique ou des retraités ne m’intéresse pas…

Exploration des voyages initiatiques

Que cherche-t-on dans les pérégrinations initiatiques ?

Qu’y découvre-t-on sur soi ?

Quelles perceptions et représentations de l’autre en émanent ?

Voici les questions qui font réfléchir l’initié que nous sommes !

En fait, les trois voyages initiatiques du 1er degré ne sont que des prétextes…

Notre Frère Michel Maffesoli, dans son ode au Nomadisme, écrivait : « Le monde n’est misérable que pour ceux qui y projettent leur propre misère, le monde est en fait en mutation permanente, il bouge sans cesse. Il avance quelquefois, il recule d’autres fois, mais qui peut refuser qu’il est en mouvement permanent. » Le monde bouge, la terre tourne, le cosmos est en expansion et l’homme, ce fou, espère toujours la stabilité, l’équilibre, le repos, le calme, la sécurité…

Les mystères avec leurs secrets, leurs cérémonies brillantes et leurs rituels compliqués ont toujours provoqué une attirance importante de toute l’élite intellectuelle et spirituelle et cela dès l’Antiquité.

À l’origine, il s’agissait du mode d’instruction d’une humanité encore proche de l’animalité, à qui les instructeurs, qualifiés de dieux par Platon, cherchaient à inculquer les éléments d’une vie morale et sociale.

Sur les côtes et dans les Îles, l’océan était considéré comme le père de toutes choses et par conséquent des hommes. Dans les vallées, ce sont les fleuves qui sont les ancêtres des héros. À l’intérieur des terres, les premiers hommes sont nés de la Terre.

Mais, l’homme a toujours voulu savoir plus.

Mouvements des civilisations et quête existentielle

Et ainsi, les civilisations se sont déplacées d’est en ouest : Chine, Mésopotamie, Égypte, Judée, Grèce, Empire Ottoman, Rome, Espagne, Angleterre, États-Unis, pour revenir aujourd’hui à la Chine en passant par le Japon. Ceci est le sens de l’évolution marchande et c’est aussi celui de la marche du soleil et de la vie de l’homme : de sa naissance figurée par l’Orient à sa mort, l’autre rive comme le disaient les Égyptiens, figurée par l’Occident. Depuis toujours, philosophes, interprètes, marins, médecins, artistes et marchands qu’ils soient grecs, phéniciens ou juifs, mais encore mongols, indiens ou perses, développent des circuits de commerce entre tous les empires de l’Eurasie. Les guerres n’arrêtent pas la circulation des idées de progrès de la Chine au Portugal.

Dans le même temps, des voyages commencent pour retrouver l’état primordial, la pensée primordiale, la première étincelle, la parole perdue… en fait une réponse aux angoisses métaphysiques de l’homme ! (parce qu’il se souvient que ces ancêtres avaient faim et qu’il leur fallait trouver ailleurs de quoi se nourrir…)

Au travers de tous ces échanges, l’idéal judéo-grec se précise : la liberté est une finalité (en tout cas, c’est mon sentiment !). Liberté individuelle et ordre marchand seront désormais inséparables. Et pourtant, à ce moment précis où les deux parties du monde s’interpénètrent (entre – 3000 et + 300), se situe le grand tournant : l’Asie entend libérer l’homme de ses désirs, l’Occident souhaite lui permettre d’être libre de les réaliser.

Interrogations sur la nature du monde et de l’existence

Le monde est-il une illusion ? Ou le seul lieu de l’action et du bonheur ?

Vit-on la transmigration des âmes ou leur salut ?

Et l’homme, selon sa nature propre, sa mission, le moment qu’il vit, son besoin du moment, ira de l’Orient à l’Occident ou de l’Occident à l’Orient.

Ces déplacements en apparence contradictoires s’effectueront de manière concomitante et en permanence. Les chemins se croisent entre ceux qui vont aux sources et ceux qui suivent le chemin du développement économique. En définitive, il existera toujours deux fondements au développement de l’homme et d’une société humaine : le sens du voyage et le sens de l’accueil, l’un ne va pas sans l’autre !

Le Manichéisme et l’accueil égyptien : exemples de voyages spirituel

Une preuve du sens du voyage parmi tant d’autres : le manichéisme qui se présente comme une énigme au regard de l’histoire est né au milieu du 3e siècle dans la Babylonie aux confins du christianisme et du pur paganisme. Il s’est répandu chez l’un et chez l’autre, jusqu’en Espagne (suivant la route du développement économique) et dans l’Afrique romaine jusqu’au fond de la Chine et de la Mongolie. Impressionnant, non ?

Une preuve du sens de l’accueil : l’Égypte. La doctrine égyptienne nous présente le « voyage aux terres divines » comme une série d’épreuves, au sortir desquelles s’opère l’ascension dans la Lumière. Le voyage s’effectue, alors, dans la tête (c’est le premier exemple connu). Le Voyage (avec un grand V) devient la représentation dramatique des renaissances de l’âme humaine, passée, présente et future, sa descente dans la matière, sa captivité en des corps d’emprunt ; sa ré-ascension par étapes successives…

Voilà l’initiation vraie !

Il ne faut pas comprendre ses réincarnations comme des réalités sur le plan physique, mais comme des phases nécessaires à l’obtention d’un niveau spirituel supérieur de conscience et de lucidité. C’est dans ses enseignements secrets que les initiés puisèrent l’inspiration, les formes sublimes de l’art et les préceptes de la divine sagesse. Quant au peuple, on lui présentait que des « légendes », au mieux des symboles ! Les symboles pouvaient attirer la réflexion d’un enfant du peuple, tout était prévu pour lui donner la chance de comprendre et donc de s’élever. Souvenons-nous de Her-Back. La devise égyptienne aurait pu être : « À chacun selon ses besoins »… spirituels évidemment. Cette Égypte-là accueillait tous les peuples connus et échangeait tant sur le plan des marchandises que sur celui des idées. Les hébreux étaient heureux en Egypte, sinon comment expliquer qu’ils y restèrent plusieurs siècles et que certains d’entre eux dirigèrent le pays d’Aton et le temple d’On.

Un voyage à travers les époques : Cordoue et la fragilité des civilisations

Une preuve de la réussite de la conjonction des deux fondements : Cordoue. Cordoue était la capitale de l’islam, elle était la plus grande ville d’Europe jusqu’au XIIe siècle. On parle en arabe, on pense en grec et l’on prie en latin, en arabe ou en hébreu. Les richesses y affluent de tout le monde alors connu. Il y a plus de livres dans la bibliothèque du calife que dans toutes les autres bibliothèques européennes réunies. À Cordoue, se retrouve une élite créatrice exceptionnelle : banquiers, poètes, savants, marchands, Maimonide, Averroès et bien d’autres.

Mais, rien n’est définitif !

La Mésopotamie et l’Égypte, à force de vouloir faire grandir le nombre de « croyants-payant » tuèrent leurs philosophies et crevèrent par l’envahisseur.

La sagesse hébraïque disparaît au « profit », si j’ose dire, de la gestion du judaïsme dès que le nomadisme disparaît. Moïse meurt devant la terre promise, son rôle « néfaste » est enfin terminé !

Le christianisme primitif posséda le sens de la destinée. Mais avec les subtilités de la théologie byzantine, le sens caché disparut peu à peu.

La Grèce antique a raté sa vocation quand Platon, dans une œuvre dite de maturité, souligne le caractère inquiétant du voyageur (Lois, XII, 952)… la philosophie grecque décline alors…

On retrouve cette même méfiance chez les Romains dès qu’ils eurent établi l’Empire : le barbare vient troubler la quiétude du sédentaire et la digestion des sénateurs… alors que le barbare ne fait qu’affirmer sa souveraineté sur sa vie !

Continuons le voyage au travers des temps.

Les fluctuations du pouvoir

En 1148, les nouveaux maîtres de Cordoue, les Almohades, docteurs de la foi, venus du Sud marocain, interdisent aux musulmans l’étude de la pensée grecque et expulsent juifs et chrétiens de leur empire. En se fermant à l’échange, à la science, Cordoue, et par là même l’Islam, perd toutes chances de garder la direction de l’Ordre marchand et décline.

Le cœur du pouvoir du monde bascule alors vers l’Europe chrétienne, mais la noblesse conservatrice à souhait se maintient au pouvoir en protégeant les serfs contre tous ceux qui bougent : mercenaires, brigands, marchands, marins, médecins, pèlerins, jongleurs, musiciens, explorateurs, philosophes et mendiants.

Fort heureusement, certains bourgs, Venise, Anvers,… prennent le relais des idées : dans ces bourgs, il est possible de penser librement ; les pouvoirs religieux et militaires y perdent le contrôle de l’économie et du politique. Le succès de l’imprimerie est foudroyant. Les nouveaux lecteurs découvrent alors que la Bible ne contient pas exactement ce qu’en disent les prêtres ; qu’il existe aussi des essais philosophiques, qu’on y parle de raison et d’amour ; qu’un savoir – juif, grec, romain, arabe, perse – leur avait été jusqu’ici soigneusement caché. Voici le renouveau, l’âge d’or qui revient ! En quelques décennies, l’imprimerie fait s’effondrer le rêve du Vatican et de l’Empire romain germanique d’homogénéiser l’Europe autour du latin et de l’Église.

Quand dans l’un de ces bourgs, Gênes, la classe créative n’est plus influencée par les écrits de juifs exilés d’Espagne ou par ceux de Jean Bodin qui se fait l’avocat de la tolérance religieuse, elle périclite et disparaît. Gènes a suivi le même chemin infernal du rejet, de l’intolérance et de la peur du nomade !

Aujourd’hui, on peut même dire que le propre du politique, dans son souci de gestion, est de se méfier de ce qui est errant, de ce qui échappe au regard… regardez le développement des caméras vidéo, c’est l’apogée de l’agression rationaliste… celle de tout savoir, de tout éclairer, de tout maîtriser. La figure du sage antique, tolérant des zones d’ombre dans la connaissance du monde, laisse la place à celle de l’expert auquel rien n’échappe.

C’est toujours la même logique qui est en mouvement sous toutes les latitudes : l’aspiration à la liberté met au pouvoir une nouvelle classe créative. Celle-ci accueille financiers, armateurs, marchands, innovateurs, créateurs, artistes et aventuriers. La nouvelle classe dirigeante libère de toute culpabilité, à l’égard de la richesse notamment. La vie publique est fastueuse, la vie intellectuelle intense : des sociétés savantes échangent des idées, des sociétés initiatiques foisonnent, des universités se développent et accueillent les étrangers. Regardez le développement du protestantisme : les Pays-Bas accueillent Descartes, des juifs chassés d’Espagne, Spinoza qui osera, vers 1650, penser à un monde où Dieu se confondrait avec la Nature, sans imposer aucune morale aux hommes, résolument seuls et libres. Mais, dès que ce monde s’arque boute sur ses acquis, il laisse le champ à d’autres volontés de libération, ailleurs ! De nouveaux voyageurs créent des idées nouvelles, des technologies nouvelles et créent un monde nouveau.

Ainsi, le cheval a donné le pouvoir à l’Asie centrale sur la Mésopotamie ; le gouvernail l’a amené en Europe ; la galère a permis à Venise de l’emporter sur Bruges ; l’imprimerie a fait triompher Anvers ; la caravelle a rendu possible la découverte de l’Amérique ; la machine à vapeur a fait triompher Londres. Une nouvelle source d’énergie (le pétrole), un nouveau moteur (à explosion) et un nouvel objet industriel (l’automobile) vont conférer le pouvoir à la côte Est de l’Amérique et à sa ville alors dominante, Boston.

Aujourd’hui, la nécessité écologique fera disparaître cette société dite de consommation, polluante à souhait et qui ne saura s’arrêter !

Sera-t-elle remplacée par une nouvelle vague technologique : celle du traitement de l’information et des objets nomades, déjà bien entamée. Nous le verrons bien !

La quête de la Liberté et de la Sagesse

Soyons conscients qu’à partir du Concile de Constantinople en 553, on vit s’édifier tout un ensemble de dogmes qui firent l’obscurité complète sur le problème de la vie, révoltèrent la raison et, finalement, éloignèrent l’homme de dieu. Mais, bien que noyées dans le sang ou étouffées sous la cendre des bûchers, des écoles initiatiques secrètes ont perduré… Au moyen âge, une sorte de nuit intellectuelle se fit sur l’Europe. Pourtant, grâce aux voyageurs, les trouvères, Dante Alighieri et sa Divine Comédie et bien d’autres comme Thomas Moore, Paracelse, Jacob Boehme, Giordano Bruno, Campanella affirmèrent et enseignèrent au gré de leurs voyages la grande synthèse, souvent à leurs dépens… mais les grandes lignes de l’initiation antique se transmettront. Tel sera le sort de toutes les puissances, de toutes les nations qui furent grandes par leurs philosophes et leurs penseurs et qui ont eu la faiblesse de remettre leur destinée aux mains des politiciens et des financiers trop avides. Quand la domination des financiers et des politiciens arrive, n’ayez crainte, la civilisation décline, puis disparaît…

Rien n’est jamais définitif, mais pourtant les philosophies demeurent et se transmettent. Pour ceux qui ne croient pas au progrès qu’ils méditent les informations suivantes : le système mondial se libéralise partout. En 2006, plus de 120 pays ont aboli la peine de mort. Près de 140 pays pratiquent des élections plus ou moins libres. Plus de 80 d’entre eux sont à peu près démocratiques (à savoir que le pouvoir exécutif y est contrôlé par un Parlement et que les principaux droits de l’homme y sont respectés). C’est mieux, même si cela n’est pas parfait ! C’est mieux parce qu’une idée-force n’est jamais arrêtée par un tyran, une église, un parti politique, un pouvoir. L’idée de liberté circule et circulera toujours parce qu’il y aura, immuablement, un porteur de valeurs qui se lèvera et se mettra à marcher !

Je sais qu’une recherche d’une histoire continue des mystères initiatiques serait vaine et vouée à l’échec. Depuis toujours, l’homme a eu besoin de connaître son origine ou le mythe de la sagesse primordiale. Le mythe du premier homme (ou de l’origine) est destiné à rendre possible une vie nouvelle (une seconde vie). Cette idée n’est possible que par le retour derrière soi, vers son origine absolue, afin de construire au-devant de soi une vie nouvelle. Quel paradoxe ! Ainsi, l’homme ouvre toujours son champ de vision pour aller plus loin, plus haut, au-delà de ses potentialités, il sort de son être pour le projeter là où il rêve d’être pour se retrouver et être vraiment !

Nombreux furent ceux qui ont pris le chemin du retour sur soi. Ils partirent vers la Chine, les Indes, Sumer, la Judée, l’Égypte… Pythagore découvrit en Egypte les bases de son théorème célèbre. Mais il ne fut pas seul, Marco Polo, Alexandre le Grand et bien d’autres… tous suivirent, en fait, le chemin de la progression vers la liberté. Il suffit de suivre ce chemin pour comprendre l’homme et son évolution, autant sinon plus qu’en suivant celui de l’évolution du développement économique.

Le départ est, pour l’homme qui cherche, constant et permanent : non pas que le voyage soit à refaire, mais si le voyage est celui de la liberté, chaque acte est en lui-même un départ et un commencement. Et pourtant, me semble-t-il, la marche vers la liberté n’est possible que si elle est faite en commun, elle ne peut être authentique que si les hommes ont respectivement et entièrement accompli une conversion radicale.

À la quête de la Sagesse et de la Connaissance

Voilà le sens de notre initiation parce que vivre c’est risquer.

L’Homme ne progresse qu’en risquant dans l’insécurité. L’Homme n’est pas un joueur de mikado qui, comme les syndicalo-fonctionnaires français d’aujourd’hui, perd dès qu’il bouge !

Voyager c’est quitter le quotidien pour se rendre disponible à d’autres hommes, à d’autres vies, à d’autres expériences. C’est aussi disposer de soi-même. Or, cette disposition de soi, cette autonomie est ici un fait nouveau puisqu’elle caractérise la seconde vie inaugurée par la conversion.

Alors, on comprend mieux la quête des Indes et du Paradis qui n’est pas la découverte de nouvelles routes pour les épices car il fallait retrouver le territoire du prêtre Jean, souverain mythique.

Alors, on comprend mieux le voyage vers l’Orient dont le modèle est celui d’Alexandre le Grand. Ses expéditions militaires sont valorisées en fait par une quête initiatique de l’immortalité de l’âme. C’est la conquête des Indes pour la Connaissance. Explorer les régions inconnues et inaccessibles du monde revient à cartographier les zones d’ombre de soi-même, c’est un processus d’auto-connaissance. D’ailleurs, le couronnement de la quête d’Alexandre est représenté par sa tentative de conquérir le Paradis. Au-delà des Indes, se trouve le jardin biblique d’Eden (le Sri Lanka d’aujourd’hui). Après avoir parcouru tout le monde physique, Alexandre arrive aux confins de monde métaphysique. Il trouve là sa limite, se heurtant à l’interdiction divine d’y pénétrer.

Alors, on comprend mieux le sens des croisades : certes, de nombreux croisés sont à la recherche du tombeau du Christ (c’est ce qui est souvent exprimé par les livres d’histoire « officielle »), mais d’autres, plus conscients, sont partis sur le chemin d’une quête mystique et spirituelle extraordinairement forte : les initiés sont allés directement prendre possession d’un secret, puis fondèrent l’Ordre du Temple…

Ce qui est visible n’est pas toujours vrai. Combien de pèlerins modernes partent à Compostelle sans savoir que l’important est de trouver le chemin du retour ?

Le voyage initiatique vers la Sagesse et l’éveil intérieur

Alors, on comprend mieux la fameuse chute d’Adam : elle crée la mise à l’épreuve par l’interdiction. La Loi divine permet à l’homme de cueillir durant sa vie terrestre des fruits de la connaissance que ne peuvent lui procurer les jardins du paradis. Ce n’est pas l’interdiction qui est importante c’est sa transgression.

Alors, on comprend mieux, la quête d’Abraham qui symbolise l’humanité naissante. Éprouvé par le désir du fils, il est éloigné, dispersé, pour que sa race se multiplie. Naît ainsi la notion de sacrifice. Le sacrifice sublime le corps, tout comme le tannûr (l’athanor) en perdant le tâ’ (le corps) devient lumière (nûr).

Alors on comprend mieux tous les autres voyages mythiques (Jacob, Joseph, Moïse,…) qui représentant la lutte contre la peur, la méfiance, ramènent l’impétrant dans et sur la Voie. L’homme voyage pour trouver un accomplissement et va vers l’autre pour atteindre la perfection.

L’initié, lui, continuera à se demander quels sont les progrès accomplis à chacune de ses haltes, les circonstances de cet immense voyage et la nature particulière de ses résidences. Pour moi, le propre du voyage initiatique, celui qui peut être fait sans quitter son Temple, est d’aboutir à un résultat. En arabe, il est très significatif que le mot « voyage » se dit safar. L’autre sens de ce mot est « dévoilement ». Le voyage est appelé ainsi parce qu’il dévoile les caractères des hommes… En fait, les traditions nous apprennent que tous les êtres participent d’un voyage universel sans fin ni dans ce monde ni dans l’autre et à tous les degrés de l’être, mais à l’intérieur de nous. L’homme n’est pas fait pour s’établir… à rapprocher d’une des significations de Jakin. Il ne faut pas s’établir, mais établir les bases de notre propre construction et cela est possible sans obligatoirement voyager (colonne brisée du RER).

L’existence suppose le mouvement. Le nomadisme peut être considéré comme une expression de l’exigence d’une vie marquée par le qualitatif, le désir de briser l’enclosure et « l’assignation à résidence » (célèbre formule de Michel Maffesoli), propres à la modernité.

Le repos comme le néant n’est qu’une impossibilité.

Regardez le cosmos, le voyage des étoiles, des planètes et autres comètes, est perpétuel. Rien n’a de fin… Comment le voyage initiatique prendrait-il fin, alors que son but est l’infini et que l’on ne dépasse jamais une station sans que n’en apparaisse aussitôt une autre ?

Par le voyage initiatique, c’est une façon d’innover le monde en faisant apparaître ce qui n’était pas à nos yeux, à travers le regard que nous portons sur le monde, puis sur nous-mêmes. Ce passage de l’extérieur vers l’intérieur se traduit par l’antériorité des sciences cosmologiques acquises par Enoch et Noé. L’homme voit d’abord à l’extérieur ce qu’il porte en lui-même.

Une nouvelle étape initiatique (grades ou degrés) le conduit donc vers son être intérieur. Nous sommes le but parce que nous sommes les seuls dépositaires du véritable « secret divin » : les seuls chargés de l’achèvement de la création.

En descendant, nous fondons le Droit et le statut des êtres.

En s’élevant, nous déchirons le voile de la séparation.

L’homme est tiraillé entre ces deux voies, il réalise quelquefois les deux potentialités. Mais, par là même, il devient son propre voile, son propre obstacle… l’initiation aide l’homme à faire le clair sur ses voiles, ses couches opaques qui empêchent sa vérité d’être éclatante. Elle ne sert qu’à cela si nous comprenons bien son enseignement… alors tout est possible ! Être inquiet ou en déséquilibre, n’est-ce pas, en définitive, le propre de tout élan vital ?

Alors, mettons-nous en marche et que notre Maître des Cérémonies nous donne le rythme de l’aventure au quotidien, dans la Loge où s’exprime un puissant échange symbolique, où le matériel et le spirituel trouvent leur place, où l’imagination et le réel font bon ménage, et surtout où, quelles que soient sa race, son idéologie, ses convictions, c’est le souci de l’autre qui prévaut.

C’est cela le propre de l’errant et de l’initié : exprimer une forte personnalité ne prenant sens qu’au sein d’un groupe fortement soudé.

S’il est vrai que le « territoire » est le topos du mythe, il n’en est pas moins vrai que toute société a besoin d’un non-lieu (u-topos). Il faut que quelqu’un vienne déstabiliser, vienne rappeler que le dysfonctionnement, le péché, le malheur font aussi partie intégrante de notre vie, de nos expériences humaines.

L’essence du passage initiatique

Aussi, les thèmes nombreux du « passage » en maçonnerie nous rappellent notre nécessité à rechercher les hommes qui sortent de l’ordinaire pour venir travailler sur les colonnes et non pas les sympathiques hommes communs qui viendront renforcer les adhérents et repousser les adeptes hors des Loges. Parce que nous sommes Hermès, un pied pour se poser sur la terre et un pied ailé pour s’en extraire… parce que la routine du quotidien ne propose rien à celui qui ressent la nécessité du voyage initiatique.

Ainsi, la symbolique maçonnique ne fait que préserver et accentuer le lien entre l’initiation, la réalisation de soi, l’exigence spirituelle et l’errance du souffle de la Liberté : l’esprit enfin libre souffle où il veut, comme il veut et quand il veut…

Partagez Votre Voyage Initiatique

Continuez votre exploration de la franc-maçonnerie et de ses mystères. Partagez vos réflexions et expériences sur le nomadisme spirituel dans les commentaires !

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire